Représenter les transidentités autrement
Sabrina Osbourne est une femme trans américaine qui n'attend que sa vaginoplastie. Mais sa psychiatre refuse d'autoriser l'opération tant que Sabrina n'aura pas reconnecté avec son fils mineur, qu'elle a eu avant sa transition. Sabrina part en road trip récupérer son fils, sans lui apprendre qu'elle est sa mère.
Film américain de 2005, Transamerica est moins pire que The Danish Girl dans sa représentation du parcours de transition médicale de son héroïne trans. On y parle sans clichés d'hormones, d'orthophonie et de volonté d'être stealth. Néanmoins, tout le film est centré autour du but de Sabrina de passer pour une femme cis et hétéro, en ayant sa vaginoplastie. Le problème n'est pas de vouloir une vagino, mais d'en faire le moteur principal de l'histoire. La vie de Sabrina ne semble d'ailleurs dictée que par la performance de son genre, et ce, dès l'introduction du film qui la filme longuement s'habiller de rose et se maquiller. De nouveau, ce n'est pas le problème de performer son genre, mais de ne pas offrir d'autres perspectives narratives à Sabrina.
La transphobie médicale n'est jamais dénoncée, même si elle est présente lorsque la psy refuse de laisser Sabrina faire l'opération qu'elle désire, pour un motif arbitraire, et alors que Sabrina a attendu des années pour cela. Encore aujourd'hui, les personnes trans sont soumises au bon vouloir de praticien·ne·s et de structures transphobes pour leur soin.
L'affiche insiste sur l'ambiguïté de genre de Sabrina, par le fait qu'elle sorte des toilettes des hommes, et sous-entend ainsi qu'il y aurait lieu de s'interroger sur le genre de l'héroïne. Pourtant, rare sont les femmes trans qui, après avoir débuté leur transition, vont encore dans les toilettes pour hommes. C'est d'ailleurs par manque de toilettes que ses organes génitaux sont révélés dans une scène, par inadvertance, à son fils, qui comprend alors qu'elle est trans. La transidentité de Sabrina est en effet traitée comme un secret. Elle se distancie, par exemple, de ses connaissances trans pour ne pas être associée à elles. Aussi, son comportement pourrait presque entrer dans le cliché du personnage déloyal, qui ment à ses proches, non pas sur sa transition, mais sur son lien de parenté avec son fils.
D'ailleurs, son fils ne réagit pas mal à l'annonce de sa transidentité, mais tombe peu à peu amoureux d'elle. Ce jusqu'à ce que Sabrina lui avoue qu'elle est sa mère, tandis qu'il tente de coucher avec elle. Le rejet du fils est alors violent. Difficile de comprendre la nécessité de mettre une intrigue pseudo-incestueuse dans un film sur une femme trans, si ce n'est par transphobie.
Par chance, la fin relève le niveau en ce qu'elle ne se termine pas par l'opération d'affirmation de genre, même si celle-ci est montrée. Dans l'épilogue, Sabrina est heureuse, s'épanouit dans son travail et a gardé contact avec son fils.
Pour son rôle de Sabrina, l'actrice cis Felicity Huffman a reçu plusieurs récompenses. L'activiste et autrice trans Andrea James, qui a un petit rôle dans le film, a servi de consultante pour le script et pour l'actrice principale.
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